Force est de constater l’inexistence, en droit français, d’une procédure permettant de restituer des œuvres spoliées appartenant au domaine public : elles sont inaliénables. C’est donc pour pallier cette carence que le Parlement a adopté le 22 février 2022 une loi relative à la restitution de quinze œuvres spoliées pendant la Seconde Guerre Mondiale. Cette loi laissait un délai d’un an aux institutions publiques concernées et les restitutions sont aujourd’hui sur le point de s’achever. Trois œuvres majeures ont déjà retrouvé leur collection légitime.
La première œuvre à avoir été restituée l’a été le 23 mars 2022. Il s’agit du Rosier sous les arbres (c. 1905) de Gustav Klimt qui a été restituée par le Musée d’Orsay aux ayants droit de la collectionneuse juive autrichienne Nora Stiasny. C’est ensuite Le Père (1911) de Marc Chagall qui a été restitué par le Centre Pompidou le 1er avril 2022, aux héritiers du luthier et violoniste David Cender. Le 19 mai dernier, le Carrefour à Sannois (1936-1937), peint par Utrillo et jusqu’alors conservé par la ville de Sannois, a été restitué à l’ayant droit du galeriste juif Georges Bernheim.
Douze dessins et sculptures doivent être prochainement rendus aux ayants droit d’Armand Dorville. Ce français, juif de confession et avocat de profession, détenait une collection d’art comptant plus de 450 œuvres. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, il trouve refuge en Dordogne avec sa famille et y meurt en 1941. Ses biens sont alors liquidés lors d’une vente aux enchères à Nice : la famille ne perçoit pas la recette de la vente et les ayants droit assurent qu’elle a été forcée. Cependant, la CVIS, estimant qu’il n’y a pas eu spoliation, recommande simplement de « rendre » et non de « restituer » ces œuvres conservées au Louvre, au Musée d’Orsay et au Château de Compiègne. Cette remise achèvera l’exécution de cette première loi de février 2022, loi qui amorce un tournant dans l’histoire des restitutions d’œuvres spoliées appartenant aux collections publiques.
Lire l’article de Corinne Hershkovitch sur ledit projet de loi, en date de décembre 2021.